mardi 5 juin 2012

Démantèlement | stockage




Dans un lapes de temps très court nous avons eu l'autorisation d'intervenir dans la bijouterie Au Joyau afin de démonter les parois du magasin.

Premier démantèlement pour notre collectif. Lors de la prise en procession des lieux, nous avons été victime de la casse déjà existante du magasin par le repérage que l'architecte avait fait auparavant pour se rendre compte des gravats et déchets à enlever. Panneaux cassés, lattes de plafonds arrachés. Nous avons donc fait un premier tri sélectif des matériaux considérés comme « potable » à la réutilisation.

Lors du démontage, des dommages inévitables ont été commis : tout les matériaux n'ont pas pu être conservé. Nous ne savions pas par où commencer. En effet, cette tâche délicate et ingrate ne fut pas une affaire facile, car, nous ne savions pas comment les panneaux étaient assemblés (rainé-crêté ou lamello). Parfois collés ou juste assemblés, la difficulté pour les désolidariser les uns des autres étaient plus ou moins fastidieux. Le tout était visé sur des liteaux eux-mêmes fixés aux murs. L'ampleur des dégâts se résume à la casse d'un miroir et d'une applique. En effet, l'un s'intitulant « cash only » était collé au mur et l'autre « semblait » indémontable.

Malheureusement, la moquette trop bien collé et n'a pas pu être récupéré. Nous avons dû nous rendre à l'évidence, il était impossible de l'arracher proprement. Ceci n'était pas sans un pincement au coeur, mais l'histoire de celle-ci s'achève ici. Cependant, nous la retrouvons au bas de quelques panneaux miroir.

L'entreposage durant le transport c'est bien passé. Lors du stockage dans notre établissement, parfois horizontal et vertical, un panneau-miroir s'est fendu en son milieu. La numérotation des panneaux lors du démantèlement nous a permis un remontage plus aisé et plus efficace.

Le système d'assemblage étant déjà existant, ils nous étaient impossible de les remonter différemment. Contraints de garder cette trame initial, nous n'avons pu concevoir un autre aménagement. La seul solution pour réaménagé l'espace aurait été de supprimer les champs existant pour recréer un autre système d'assemblage (cf : article facette).

Lors du remontage nous nous sommes aperçues que quelques tablettes manquaient, tiroirs oubliés ou égarés... Nous évoluons alors dans un espace incomplet et inachevé. Par ailleurs le plafond en latte plaqué or effet miroir est très fragile, il se déforme très facilement laissant apparaitre chaque choc. Il nous en manque un certain nombre, et malheureusement, les lampes halogènes incrustées dans ce plafond n'ont pas été réutilisable. Les lattes découpées à cet effet sont donc considérées comme des déchets.

Le comptoir, partie centrale de la bijouterie n'a pas été intégré dans notre atelier. Il aurait été encombrant plutôt qu'utile.

Voici, les problèmes auquels nous avons dû faire face.










lundi 4 juin 2012

Récit


Récit n.m. Relation écrite ou orale de faits réels ou imaginaires

C'est en 1956 que le joyau voit le jour. M. Et Mme. Zavadil en sont les heureux propriétaires. Sont-ils frère et soeur ou mari et femme ? Peut-être est-ce des jeunes mariés qui se lancent dans une folle aventure ? Pourquoi une bijouterie ? Est-ce une tradition familiale, un investissement prometteur, un secteur en pleine expansion ?

L'arcade qu'ils acquièrent est une aubaine. Située dans un beau bâtiment de l’îlot historique de la Tour Maîtresse, en plein coeur de Genève, elle leur garanti un avenir prometteur. Le volume est très beau, il y a du marbre aux murs, des plafonds hauts et des moulures. Néanmoins, ils désirent y apposer leur style et rendre l'environnement de leur nouvelle boutique plus contemporain.

Des parois de plâtre sont montées devant le mur d'origine puis recouverts d'un papier peint rayé vert. Les rayures sont nacrées, signe de préciosité. Une moquette est posée au sol, afin de le rendre plus agréable au pied. Cette dernière est verte elle-aussi, d'un ton qui s'harmonise avec les mur et a un motif en quadrillage. Finalement, un faux plafond est posé, selon le même quadrillage en diagonales que le sol, rabaissant considérablement la hauteur sous plafond. C'est l'entreprise autrichienne Norma qui réalise les travaux.

La bijouterie connaît certainement un âge d'or. On vient y acheter des bijoux pour une fiancée, des gourmettes pour un nouveau-né, des alliances que de jeunes époux s'échangeront en gage de leur fidélité. Le fleuron de l'horlogerie genevoise y est présenté. Des sourires, des regards brillants et émus, du passage, des présences, un bal...

Nous voilà déjà en 1985. Les Zavadil sont attachés à leur petite échoppe mais de grands magasins ont envahis les environs. Les choix proposés par ces derniers rendent l'offre marchande plus diversifiée. Des produits moins chers ont vus le jour. Malgré une clientèle d'habitués, la fréquentation du joyau décline, la tapisserie leur paraît tout à coup délavée, la moquette usée et salie. Ils décident qu'il est temps d'offrir un lifting à leur boutique.

Les moyens manquants peut-être, ou la nostalgie étant trop forte, les Zavadil ne retirent pas l'ancien revêtement mais ajoutent une couche. Ce choix nous permettra de remonter le temps tels des archéologues.

Après de grands débats devant l'infinité de possibilités de revêtements désormais proposée, ils optent pour le classique presque intemporel du bois de ronce, associé à des miroirs et à un faux plafond doré. Ils recréent ainsi une brillance multipliée qui permet aux clients de s'admirer tout en gardant un oeil attentif sur eux. De la ronce de noyer donc. - Oui mais en imitation. L'efficacité dans le temps des stratifiés est prouvée depuis quelques années et les Zavadil ne désirent pas connaître à nouveau la déconfiture du papier-peint délavé.

Christiane Zavadil en est toujours très satisfaite 20 ans après. La couleur n'a pas bougé, une tache s'élimine aisément et son effet décoratif est intact. Cependant, en 2012, elle est amenée à vendre son joyau. En effet, elle prend sa retraite et l'âge d'or de la bijouterie n'est plus qu'un lointain souvenir, elle est à bout de souffle.

C'est par un coup de téléphone surprenant que Christiane apprend alors que le nouveau propriétaire de l'arcade a tout vidé, qu'il s'est débarrassé de ce décor qui l'avait entouré tant d'années durant. Au téléphone, elle adopte un ton sévère et coupe court, elle préfère ne plus en entendre parler, le joyau est désormais derrière elle.

Un architecte ? - Elle ne se souvient plus. Une entreprise ? - Non plus. Des photos d'archive ? - Pas d'avantage, elle regardera, rappelleras peut-être – finiras par oublier.

Le joyau restera une énigme, à chacun d'imaginer l'histoire de ces murs, de recomposer librement autour de ces quelques éléments récupérés, recueillis.

mercredi 30 mai 2012

Sentiment d'attachement à l'usage





N'avez-vous jamais remarqué à quel point l'homme s'attache à des choses – parfois inutiles – à l'usage ? Ne dîtes rien, je suis sûr que vous avez tous un doudou ou un nain de jardin, un objet unique, que l'on vous a offert et que vous planquez sous votre oreiller ou dans votre salle de bain. Vous le trouvez ancien, désuet – voire antique – mais il vous est inconcevable de vous en séparer. Pourquoi ? Tout simplement parce que c'est une partie de votre histoire. Une partie de vous-même. Littéralement, vous éprouvez de l'affection, un réel sentiment pour cette chose ; d'où le terme « d'attachement ».

Cependant, s'il vous venait à l'esprit de vous en séparer, vous éprouverez un certain manque - voire un profond désarroi - car vous vous y êtes maintenant habitué. Mais ce n'est rien comparé à la perte d'un objet que vous tenez vraiment et qui a une réelle valeur sentimentale et symbolique. Comme la montre ou la chevalière de votre grand-père par exemple. Cet objet est en votre possession. C'est votre propriété.

Que cela n'en tienne, ceci n'est que matériel. Même si de nombreux objets nous sont utiles et indispensables. Dans ce cas, l'attachement relève plus d'une extension de notre corps. C'est un outils de travail façonné par le temps améliorant notre quotidien.

Mais n'oublions pas qu'un sentiment est avant tout humain et que le réel attachement est le rapport que l'on entretient avec nous-même et avec autrui.

Stock





Catalogue de vente aux enchères


Lorsque nous avons réfléchi, à la reconversion de nos matériaux, l’idée d’organiser une vente aux enchères est apparue.
La vente aux enchères a un côté prestigieux qui nous permet de changer le regard (et par conséquent le jugement) que l’on peut avoir sur ces matériaux. En effet, si l’on décidait de vendre ces mêmes matériaux au marché aux puces, le contexte influerait sur l’opinion des acheteurs et sûrement sur le prix qu’ils seraient près à mettre pour les obtenir.
Une question se pose alors : qu’est-ce qui donne de la valeur à un objet ? Le temps passé sur le chantier, la phase de récupération, le temps passé à les nettoyer, à les mettre en valeur dans un catalogue ou tout cela à la fois. Et si ce travail était considéré par nous comme un acte artistique, qui décide alors de la valeur à leur attribuer ? Nous-même, les experts en marché de l’art, ou notre popularité.
Il n’y a pas de règles précises, pas de références sur lesquelles se baser. Tout cela est complexe et rempli de codes que nous ne maîtrisons pas. C’est ici que se trouvent les limites de notre expérience, qui ne trouvera donc pas de concrétisation.
Notre démarche est plus simplement de prendre des matériaux qui se voulaient représentant d’une certaine image du luxe en 1985, à Genève. Avec le temps, ses matériaux sont devenus désuets de par leur esthétique dépassée, leur façon d’imiter des matériaux qui sont, eux, réellement luxueux. Tout en ce démodant, ils ont acquit un statut vintage, porteur de mémoire du passé. C’est le témoignage de ce passé, l’usure et, par conséquent le vécu de ces matériaux que nous mettons en avant dans ce catalogue. C’est leur histoire qui les rend précieux et uniques. Ils ne sont plus synonyme de luxe, mais deviennent à proprement parler un produit de luxe. C’est toute l’ironie du processus auquel nous décidons consciemment de mettre fin, en décidant de ne pas les vendre.




Tous les matériaux présents dans ce catalogue sont issus d'une ancienne bijouterie genevoise.
Ils sont le témoignage d'une époque, aujourd'hui obsolète.
Ils gardent cependant en eux, le pouvoir de nous replonger dans le passé de ce lieu, dans cette atmosphère qui reflète une certaine image du luxe, dans les années 80.

Caractéristique de la loupe de noyer

Le dessin du bois utilisé dans la bijouterie fait référence à la loupe de noyer. Mais ce n'est qu'un décor.


Loupe subst. fém. Excroissance ligneuse qui se forme sur le tronc ou les branches de certains arbres.


Que ce soit dans le domaine de la métallurgie, la technologie ou de la botanique, la loupe est synonyme de malformation, de défaut. On pourrait à juste titre comparer la loupe de noyer à un défaut de cristallisation ou à un kyste.

Le noyer, quant à lui fait parti de la famille des juglandacées. On le trouve en Europe, en Asie mineure et au Nord de l'Inde. Ce bois est utilisé généralement en menuiserie et en ébénisterie grâce à sa noblesse et sa résistance.



Fabrication.
Dans le cas de l'imitation de la loupe de noyer :

L'imitation, elle est fabriqué industriellement. Elle se compose de deux éléments :

Un panneau d'aggloméré faisant office de structure.
Une feuille de stratifié en loupe de noyer pour le décor.

Lorsque la feuille de stratifié est fabriqué il suffit de la collé directement sur le panneau d'aggloméré. 

La loupe de noyer, la vraie, est utilisé à la fin du XIXe siècle dans l'ameublement, cependant, l'imitation, nous le voyons tout les jours est mis en oeuvre dans des endroits un peu plus différents. Les intérieurs de voitures haut de gamme, les agencements de vitrines de bijouteries, les cages d'ascenseurs...

Quelques exemples de pionniers à utiliser la loupe de bois dans l'ameublement.

Cabinet état d'angle, Emile-Jacques Ruhlmann, vers 1920

Commode modèle Colette, Emile-Jacques Ruhlmann, vers 1923

     Paire de meuble, Jules Leleu, vers 1927

Fournisseurs :


www.argolite.ch
www.hiag.ch
www.jordan-tanner.ch

mardi 29 mai 2012

Strip-tease



Mue n.f. Renouvellement partiel ou total de la peau, des poils ou des plumes d'un animal sous l'influence de la croissance, de l'âge et des conditions du milieu





Option du jour


Mettre les doigts dans la prise

Ambiguité


« Au commencement, il y eut le vêtement. L’homme était en quête d’une protection contre les rigueurs du climat, cherchait protection et chaleur dans le sommeil. Il avait besoin de se couvrir. La couverture est la plus ancienne expression de l’architecture. À l’origine elle consistait en peaux de bêtes ou en tissages. La couverture devait être fixée quelque part pour offrir à la famille une protection suffisante, d’où les murs. C’est ainsi que se développa l’idée de construction. (...) le revêtement est plus ancien que la construction. » 
 

A. Loos, « Le principe du revêtement », (1898) in Paroles dans le vide
En installant Gigastudio, nous nous sommes retrouvés dans une grande salle, générique et identique à toutes les autres salles du bâtiment.

Nous avions décidé de nous entourer des matériaux récupérés afin de les voir à nouveau, de leur accorder notre attention.

D'abord appliqués sur les deux murs existants, ils sont rapidement devenus paroi scindant l'espace. Ce geste à priori anodin peut transformer complétement la définition du revêtement et sa vocation première. En effet, le revêtement est habituellement la couche de finition, appliquée pour protéger ou décorer une surface. Ici, il prend une toute autre signification, devenant démarcation.

Nous créons notre bulle, notre intimité, l'espace de Gigastudio, dans un environnement plus vaste dont nous tentons de nous séparer. Ce revêtement extrait n'est plus un décor à rien mais un lieu habité. Son expression radicalement opposée à l'in-expression du bâtiment l'environnant, son motif d'un goût peu habituel que nous décidons de tolérer autour de nous et sa charge symbolique sont récupérés à notre compte. Nous affirmons ainsi notre différence, nous nous extrayons d'un contexte bruyant, scolaire, pour devenir ces acteurs que nous cherchons à être, des membres du collectif Gigastudio, ayant laissés nos costumes d'étudiants derrière cette séparation énigmatique.

Ce n'est donc plus vraiment un geste que nous faisons vers eux, une clémence que nous leur accordons. Ils deviennent nos compagnons, indispensables à notre propre développement. Ils nous servent plus que nous leur servons et sont libérés en partie de la futilité dont nous les accusions auparavant.




Bruler | Jeter | Abandonner







Qu'allons nous faire du revêtement de notre agence si un jour nous décidons de dissoudre Gigastudio ?

Notre collectif à pensée à plusieurs possibilités :

- La destruction par le feu ?
- Les abandonner dans la rue afin de voir l'appropriation ou non de ceux-ci ?
- Les mettre à la benne directement ?
- Organiser une vente au enchère ?

On peut, peut-être nuancer la réponse à l'acte de bruler et/ou de se débarrasser de ce qui a maintenant de la valeur à nos yeux. Il s'agit avant tout de tourner la page à un certain type de revêtement qui nous tant questionné et ému. Jadis désuet, aujourd'hui de bon goût, il faut maintenant oublier, céder ce revêtement à autre chose.

Alors comment mettre les parois de cette bijouterie hors circuit une bonne fois pour toute ? Il faut trouver une raison à ce geste fort.

Bruler / Jeter

Nous constatons que malgré nous, le fait de nous entourer de ces matériaux nous fait les aimer. Ils sont une charge émotionnelle et sentimentale de l'expérience qui parasite notre objectivité. Nous sommes aujourd'hui bien dans cette espace de travail et de créativité. Il faut alors pour s'en débarrasser un geste radical et irréversible afin de rompre avec notre attachement. Le faite de bruler ou de les jeter par la fenêtre du 3éme étage nous semble la solution la plus libératrice.

Prise de conscience / Prise de recul

Et si tout cela était absurde en fin de compte? Tout ces efforts investis pendant un semestre pour se rendre compte au final que ce n'est qu'un matériau de revêtement et qu'il n'est que décor fictif sans âme. Nous aurions ainsi créé une histoire de toute pièce afin de satisfaire nos fantasmes et nos rêves.Sa seule fonction est alors que décor dans un décor ou ce motif périmé a été de bon durant un lapes de temps très court. Nous savons pertinemment que sa destruction est pensée dès sa création alors pourquoi vouloir empêcher cela ? Nous le jeton comme il aurait été jeté dans une benne lors de la démolition de la bijouterie ou les abandonner n'importe où (aussi bien dans une benne, à la décharge ou dans la rue). Il sera vue comme déchets parmi tant d'autre au milieu de ces agrégats.

Enchère

Après avoir analysé la bijouterie en suivant notre protocole et en proposant une ré-interprétation nous avons prouvé qu'il était possible de faire quelque chose de ces matériaux voués à la destruction. Nous les ré-injectons alors dans le circuit de la consommation ou le plus offrant pourra l'obtenir afin de l'exhiber. Ces parois devenues in sont alors perçues comme des trophées de bon goût uniques et exclusifs

Le vrai visage de la loupe enfin révélé.

jeudi 24 mai 2012

L'architecte : chapitre III


Malheureusement, 2 mois plus tard, le buzz du collectif est tel que la tendance s'est propagée comme dans ses prévisions les plus pessimistes. Le miroir devient certes à la mode, mais perd son potentiel « hipster ».

Se félicitant de sa clairvoyance qui lui permet de réagir à temps, l'architecte publie une photo de l'objet, réalisée par un ami photographe, sur Ebay. Les enchères montent et l'architecte se félicite de la cote grimpante de son miroir, qui lui permet de s'en débarrasser à un prix intéressant.

Ce dernier est finalement cédé à un jeune banquier fortuné, dont le goût peu assuré est dicté par le pré-cité magazine Archicool et qui imagine avoir acquis une pièce hype et qui ne l'est pourtant déjà plus. Le pincement au cœur que ressent l'architecte lors de la transaction est vite oublié.

En effet, il se console en installant avec sa compagne des dalles de moquettes provenant d'un bureau de téléphonie renommé, en remplacement d'un tapis terriblement sage. Ce travail lui permet d'exprimer librement sa créativité débordante et de s'initier au travail de chantier. Cela sera sans nul doute un atout professionnel non négligeable.

Vivement le prochain vernissage !

mercredi 23 mai 2012

L'architecte : chapitre II


Les amis de l'architecte sont installés dans un confort sommaire sur le canapé LC2 de Le Corbusier, plus agréable à l’œil qu'au fessier. Ce dernier les a conviés à un brunch-apéro afin de vernir l'arrivée du fameux miroir.

Comme prévu, les conversations vont bon train. Est commentée la couleur chiquement passée de la moquette, la beauté du détail de la triple prise et l’œil expert de leur hôte qui a su déceler la beauté intérieure de l'objet.

L'architecte fait d'autant plus sensation qu'un article a paru dernièrement dans le magazine Archicool sur un jeune collectif de designers. Ces derniers ont eu comme lui l'admirable idée de récupérer une partie de ces autres pièces et créent le buzz. Bien que jaloux de ce triomphe qui aurait pu être le sien, cet événement confirme son pressentiment et installe une tendance encore assez sélective pour lui être profitable. Bien entendu, la reprise de cette même tendance par les masses et la copie des ces objets par les grands magasins le forcerait à se séparer prématurément de sa pièce (ce qui serait regrettable au vue de la somme investie). Cette prévision terni son humeur...

L'architecte : chapitre I

 
L'architecte est heureux. Il a déniché dans une vente aux enchère une pièce venant d'une bijouterie genevoise et datée de 1985. Il installe son nouveau miroir chez lui, au-dessus du canapé, horizontalement et non verticalement comme dans son usage d'origine. L'architecte est particulièrement satisfait de ce « twist » qui lui permet de s'approprier complètement l'objet. Le modèle qu'il a acheté était certes plus cher, car usé et donc unique, et d'un mauvais goût assumé, mais l'architecte trouve que cela donne une touche originale à son intérieur, lequel conjugue tous les classiques d'un design intemporel.

Il s'imagine déjà les conversations qui pourraient se développer autour de son acquisition. Cette pièce est le vecteur d'un passé à conter et deviendra le remplaçant de la table EM de Jean Prouvé, achetée le mois passé déjà et dont le potentiel dialectique est épuisé.

Jewelry

Our materials have always been the backdrop for more valuable things. We are adding a twist of fate and giving the materials a new value by turning the them into jewelry themselves. 
Inspired by Iluxo Jewelry & Design





mardi 22 mai 2012

Brillance, miroir et surveillance



Assise à ma table, je me vois. J'essaie d'éviter mon regard, je me retourne. C'est cette fois mon double reflet qui me dévisage avec quelque peu d'agacement. J'essaie à nouveau de me fuir, regard fixé sur mon ordinateur, c'est la seule manière de m'échapper.

Un autre entre, il est partout. Je le vois passer le pas de notre petite porte sans me retourner.

Le dos de son pull est original. Des visages, qui me dévisagent. De quoi devenir légèrement agoraphobe. Je tente de laisser mon regard s'échapper par la fenêtre, il croise le viseur d'une caméra. Fausse. Finalement, ils n'en avaient pas besoin.

Je découvre une nouvelle validation utilitaire à ces matériaux glossés qui m'entourent. Les miroirs deviennent panoptique, le vol est déjoué.







Nous avons décidés




Nous avons décidés de ne pas vous présenter la bijouterie d'origine.






Maquette


Sondage


  Après de nombreuses discussions, nous nous sommes rendu compte que nous développions un regard propre à notre formation de designers. Nous aurions pu rendre ces matériaux cool en en faisant un bar vintage, kitsch à l'extrême, ou en le réinterprétant dans un projet à l'esthétique actuelle. Nous trouvions intéressant l'exercice de créer avec quelque chose qui nous semblait d'abord moche. Mais nous avons vite réalisé qu'au delà de la tendance, il était compliqué de traiter des revêtements sans aborder la question du goût personnel des individus.

Dès lors, une question morale s'est posée à nous. Pourquoi et en vertu de quel décret une petite catégorie de population serait en mesure de décider d'un bon goût universel ? Après avoir fait nos conclusions, nous avons décidé d'entreprendre une petite enquête sociologique et d'arrêter un moment nos élucubrations afin d'écouter les autres, des gens de tous âges et de tous horizons. De nous imprégner d'autres goût, nous dictés par une culture particulière de l'histoire de l'architecture ou par la lecture régulière de petits blogs influents.

Cette étape illustre notre malaise vis à vis de la notion de tendance et de mode dont nous sommes les ambassadeurs.


Nous constatons cependant que la plupart des réponses obtenues sont des demandes. Les personnes sondées perçoivent, si elles ne les adorent pas, un potentiel dans ces matériaux et semblent attendre que nous le révélions. Les gens semblent avoir perdu confiance en leur propre jugement et attendent une validation de leur opinion, nous donnant une légitimité sans mesure.




lundi 21 mai 2012

Facettes


Tel que mentionné par le journal du design - la référence de tous les designers (sic.) - la facette géométrique est le décor à la mode. Certes, Gigastudio ne veut pas céder à la tendance, mais il ne résiste pas à montrer ce premier essai d'un vrai/faux projet de design. Et s'il suffisait d'appliquer une forme emblématique d'une époque pour redorer l'image d'un matériau?

« C'est une matérialité provisoire fondée sur des formes plutôt qu'élaborée à partir de vrais matériaux. »Rem Koolhaas

Mode, n.f. Manière passagère de se conduire, de penser, considérée comme de bon ton dans un milieu, à un moment donné. syn. engouement, snobisme, vogue




Exhibition
























"This museum actually does not exist yet. This would be the museum of fair and honest...it would capture the reason of things and encourage development." Le Corbusier, the Decorative Art


An exhibition of revetments in Geneva exalts the materials of our everyday lives. The materials of the jewelry store have been determined obsolete--we were the saving force between them and the trash. They were subject to a cycle of fashion that deems clothing, music, architecture, and numerous other expressions, along with materials, obsolete, their lifespans varying by cultural, economical, and political factors. By extracting these materials and displaying them as an insight into a time period since forgotten we stop the cycle, if for only a moment with a pause for reflection. 


The materials of the jewelry store were chosen (presumably) to be a backdrop portraying luxury. A burl pattern dominates, imitating burl wood, a rare formation of wood that is expensive and was coveted by many, but is now less popular. Golden details accent the panels and gold ceiling reflects the light like jewelry itself. The message was clear, these materials meant luxury. Now, more than 25 years later, they are considered obsolete, ugly, and worthless, demonstrated by the new owner of the jewelry store doing away with everything. Though they may not be considered the height of fashion anymore, they act as a time capsule. For a time, hundreds of customers bought their jewels for loved ones and the shopkeeper spent his days among them. These materials are an artifact of their time but most are too caught up in the cycle of change to notice.